Pour cette première entrevue de l’année, Guy Bourgeois, conférencier, formateur, motivateur et Président de Formax, reçoit Nancy Audet, journaliste, animatrice et conférencière. Son message ? En 2023, on tend la main !
ENTREVUE
Pour débuter l’année 2023, on a choisi de donner la parole à l’une de nos conférencières qui a une mission de vie extraordinaire. Vous la connaissez sûrement, il s’agit de Nancy Audet ! Marraine de la Fondation des jeunes de la DPJ, auteure de deux best-sellers Plus jamais la honte et Ils s’appellent tous courage, Nancy a un message pour nous tous.
Nancy, parle-nous de ta cause ! Que pouvons-nous faire pour aider les jeunes de la DPJ ?
Comme tu l’as dit Guy, je suis marraine de la Fondation des jeunes de la DPJ depuis presque deux ans. Étant moi-même une ancienne de la DPJ, il y a quelques années, j’ai ressenti le besoin de m’impliquer. J’ai senti que c’étais le temps pour moi de faire le pas, de raconter mon parcours à moi, de raconter comment ça avait été difficile et surtout de partager ce qui avait fait la différence dans ma vie. Qu’est-ce qui fait que j’ai réussi à m’en sortir malgré une histoire de maltraitance ? Une histoire qui n’est pas drôle mais qui touche encore à l’heure actuelle des milliers d’enfants au Québec. Cette année, il y a eu 132 000 signalements au Québec, un triste record.
Lorsqu’on regarde les statistiques, Guy, je me rends compte que souvent, on lit ça et on se dit que c’est épouvantable, mais rapidement on passe à autre chose. Donc, je me suis donné pour mission de mettre un visage sur ces jeunes-là. Je veux qu’on comprenne ce qu’ils vivent, c’est quoi leur réalité et pourquoi il y en a autant. J’espère que je vais continuer à leur donner une voix, une voix qui n’est pas nécessairement la mienne. Les gens me disent souvent « Nancy, tu es la voix de ces enfants ! » Non, je veux qu’ils aient leur propre voix, qu’on les entende plus, qu’on les voit plus. Je souhaite aussi et surtout qu’on décide de se mobiliser et de redevenir un vrai village pour ces enfants parce qu’on ne peut plus les laisser derrière. Ce sont des jeunes qui ont beaucoup de potentiel, mais qui n’ont pas les mêmes opportunités que les autres. Il faut donc leur donner plus d’opportunités.
Concrètement Nancy, qu’est-ce qu’on peut faire ? Nous sommes tous des gens de bonne volonté. On en entend parler, on se sent un peu coupable, mais ce n’est pas tout le monde qui peut devenir famille d’accueil non plus. Alors, de quelle façon peut-on aider, directement ou indirectement ?
Ce que j’entend souvent Guy, c’est « Je me sens impuissant.e ». Lorsque je vais donner des conférences, c’est important pour moi de donner plein d’idées de ce qu’on peut faire parce que ce n’est pas vrai qu’on est impuissant.
Déjà, la première chose que je dis aux gens, c’est qu’à partir d’aujourd’hui, je te mets au défi : chaque fois que tu vas croiser un enfant, je t’invite à le complimenter. On peut toujours trouver quelque chose de positif à dire. On ne le sait pas, mais on est peut-être la seule personne à complimenter cet enfant-là. Et lorsque tu n’en reçois pas beaucoup de compliments, quand tu es stigmatisé, quand tu es un enfant qui a beaucoup de difficulté à la maison ou à l’école, recevoir un compliment, ça va directement dans le cœur. Ce n’est pas long, ça prend 30 secondes et ça fait beaucoup de bien.
Sinon, moi, je suis porte-parole d’un programme de mentorat pour les jeunes de la DPJ. Je me suis rendu compte que ces jeunes-là ont besoin d’un modèle significatif. Ils ont besoin d’un adulte qui va être là pour eux parce que trop souvent ils n’en ont pas. Pour qu’un jeune se développe à son plein potentiel, c’est prouvé, ça prend 5 adultes significatifs. Lorsque je vois que ces jeunes-là n’en n’ont même pas un, ça me bouleverse. Je suis donc à la recherche de mentors pour eux. Ce n’est pas compliqué, c’est une activité par trois semaines. C’est lui permettre de vivre des activités comme les autres enfants, c’est lui permettre de développer ses passions. C’est un petit pas de plus. Moi, je le fais personnellement depuis 10 ans. Lorsque les gens me disent « C’est donc beau ce que tu fais pour eux », je réponds « Non, moi je reçois beaucoup plus dans cette relation que je donne ».
À la Fondation des jeunes de la DPJ, on a développé 60 programmes qui sont dédiés pour ces enfants. Zoothérapie, art-thérapie, on leur permet de pratiquer du sport, des cours de musique, de vivre des expériences, etc. On essaie d’être là et de leur amener de l’espoir. Si vous pouvez faire un don à la Fondation, je peux vous dire que nous allons bien utiliser cet argent-là. Les besoins sont vraiment énormes.
Ultimement, c’est sûr qu’il y a une pénurie de familles d’accueil. Je sais que ce n’est pas tout le monde qui pense que c’est possible de faire ça, et c’est vrai que c’est un grand engagement, mais c’est aussi une grande aventure humaine. Je connais beaucoup de familles d’accueil qui sont heureuses et épanouies. Pour moi, c’est l’ultime rêve. C’est de prendre un enfant qui n’a pas de famille et de lui donner ce qu’il y a de plus précieux dans la vie : une famille et un toit. Il n’y a pas de plus grand cadeau.
Le message est lancé pour tous ceux qui peuvent se donner et donner du temps et investir dans cette cause. On peut tous le faire ! Dans un autre ordre d’idées Nancy, est-ce que le grand public peut faire des signalements ou si ce n’est pas approprié ?
Oui et c’est même important ! Très souvent, il faut deux, trois, quatre, cinq signalements avant qu’un signalement soit retenu. Et les signalements, la plupart du temps, vont venir de l’école ou de la police. Les signalements ne proviennent généralement pas de la communauté. Et ça, c’est certain que ça m’agace un peu. Soyons vigilants. Si on s’inquiète vraiment pour un enfant, qu’on a l’impression qu’il vit de la maltraitance ou de la négligence, prenez le téléphone. Faites votre part pour vous assurer que cet enfant-là a tout ce dont il a besoin parce qu’on en échappe beaucoup.
Souvent, ces enfants-là arrivent sur le tard. Je pense à un petit garçon qui a été abandonné à la rue à 10 ans et dont ça faisait des années qu’il vivait de la maltraitance. Il est arrivé à la DPJ avec des séquelles sévères. Je pense que si on avait agi plus tôt, sa vie serait différente.
Donc, soyons tous vigilants, mais aussi, tendons la main ! Si vous voyez que dans votre quartier il y a une mère monoparentale, que vous voyez qu’elle a de la difficulté à joindre les deux bouts, tendez donc la main. Ce sont souvent des gens qui ont de la difficulté et qui ont juste besoin qu’on leur vienne en renfort. Tendre la main peut peut-être les aider à traverser un moment difficile. Faire une épicerie de temps à autre ou donner des vêtements, c’est de retrouver l’esprit d’entraide qui est essentiel et encore plus aujourd’hui. Le système de la DPJ, ce n’est pas un secret, est très fragilisé. Les signalements sont en hausse, les délais d’attente aussi.
Le groupe le plus touché par la maltraitance ce sont les 0-5 ans ! Redoublons de vigilance et tendons la main. Mon rêve le plus fou en 2023 c’est de ne plus attendre que les solutions viennent d’ailleurs. Je pense sincèrement que les solutions viennent de nous. Faisons de nos communautés, de nos villes et de nos villages, des lieux sécuritaires et aimants pour nos enfants. Il y a plein de petites choses que l’on peut mettre en place qui ne coûtent rien et qui peuvent vraiment faire la différence dans la vie des enfants les plus vulnérables.
Il faut juste passer à l’action ! Nancy, merci pour ton beau message, on te sent vraiment impliquée du fond du cœur. Je suis certain que, parmi les enfants qu’il y a actuellement à la DPJ, il y a plein de Nancy Audet, plein d’adultes qui vont rayonner et répandre du bonheur, se réaliser et aider à améliorer les choses. Félicitations pour ton engagement, pour tes livres et pour ce qui s’en vient et merci beaucoup de collaborer avec nous.
Bonne année 2023 ! Pensons aux enfants et tendons la main !
En savoir plus sur Nancy Audet et ses conférences : https://formax.qc.ca/portfolio/nancy-audet-conferenciere/